Métiers d’hier, métiers de demain !
L’urgence climatique pousse notre société à s’interroger sur nos modes de vies et nos méthodes de construction ou rénovation. Cela implique le développement de compétences nouvelles, l’évolution des emplois, voire l’apparition de nouveaux métiers, mais aussi parfois de se tourner vers des techniques plus anciennes, tout aussi écologiquement vertueuses.
C’est le pari que fait le Campus régional du Patrimoine bâti en proposant une formation « Construction en pierres sèches » dès la rentrée 2024.
En octobre 2024, les jeunes du LMB de Felletin (Lycée des métiers du bâtiment) en cursus maçonnerie ont eu l’occasion d’expérimenter la construction de murs en pierres sèches lors d’une première session de formation organisée par le Campus régional du Patrimoine bâti, le lycée, le PNR Millevaches et l’association Artisans Bâtisseurs en Pierres Sèches. Une première expérimentation qui a vocation à être diffusée ensuite dans d’autres lycées professionnels de la Nouvelle-Aquitaine.
La construction en pierres sèches : une pratique durable !
Les constructions en pierres sèches existent depuis des siècles et ont perduré grâce aux propriétés mêmes d’une construction sans ajouts de liants, colles ou mortiers. Si cette technique ne se prête pas aux habitations, car trop peu isolante, elle a été utilisée massivement dans le passé pour des abris agricoles (cabanes de bergers…), des délimitations de parcelles, des chemins et des murs de soutènement.
Longtemps délaissés au profit du béton, les murs en pierres sèches sont reconnus aujourd’hui pour leur vertus écologiques et environnementales :
||| ils sont naturellement drainants puisqu’aucun matériau n’est utilisé pour tenir les pierres entre elles, permettant ainsi le filtrage de l’eau ;
||| les interstices entre les pierres favorisent le développement de la biodiversité en servant de refuge pour de nombreux insectes et petits animaux ;
||| leur construction est peu polluante car elle nécessite très peu d’outils mécaniques ;
||| cette technique favorise une économie locale et circulaire en utilisant la matière première présente à proximité immédiate des chantiers (pierres récoltées dans les carrières voisines ou même dans les prés eux-mêmes).
Pour le Campus régional du Patrimoine bâti, ce mode de construction est en total adéquation avec les objectifs qu’il poursuit, à savoir : promouvoir et transmettre des savoir-faire anciens, développer le réemploi, réhabiliter le patrimoine local, et atténuer l’impact environnemental avec utilisation de matériaux locaux et géosourcés.
Un savoir-faire à retrouver
Le travail de la pierre est aujourd’hui réservé aux tailleurs de pierres. Or, la construction en pierres sèches est une pratique alliant la taille de la pierre et la maçonnerie. Cette technique n’est pas l’affaire d’un seul homme ! Peu polluante, elle nécessite beaucoup de main d’œuvre et un véritable chantier en équipe.
Ce savoir-faire ayant été quelque peu oublié, il semble nécessaire aujourd’hui de le transmettre à nouveau aux générations de maçons actuelles et futures.
C’est la mission que s’est donné l’association Artisans Bâtisseurs en Pierres Sèches (ABPS). Créée en 2002, elle regroupe actuellement 77 professionnels du bâtiment spécialisés dans les techniques de construction en pierres sèches et œuvre pour le développement de la filière et la transmission de ce savoir-faire.
L’ABPS gère l’École professionnelle de la pierre sèche, centre de formation itinérant et spécialisé, basé à l’Espinas à Ventalon en Cévennes et intervenant en France et en Europe. Uniquement dédié aux techniques de construction, c’est le seul centre de formation professionnelle en Europe proposant plusieurs niveaux de formations certifiantes. Il s’agit des formations de Certificat de Qualification Professionnelle (CQP).
C’est le CQP Niveau 1 qui a été proposé au LMB de Felletin pour cette première session : « intervenir sur un chantier de construction en pierre sèche ». Il existe deux autres niveaux pour se perfectionner jusqu’à devenir « compagnon professionnel en pierre sèche ».