Enjeux et opportunités du numérique : entre rêves et réalités
La culture, comme tout autre secteur professionnel, vit une transition numérique plus ou moins forcée selon ses composantes (spectacle vivant, musiques actuelles, livre, cinéma et audiovisuel, etc.). Cependant, le numérique est encore difficile à appréhender et chacun se forge sa propre vision de ses potentialités, qui s’accompagne souvent d’a priori, d’idées reçues, de suppositions.
Pour répondre à ces enjeux, la Région a donc proposé un temps d’échanges et de débats pendant lequel quelques affirmations ou questions volontairement caricaturales ont été soumises aux membres du public ; parallèlement à leurs réponses – présentées sous forme graphique au fil de ce compte rendu –, les universitaires présent·e·s ont partagé leurs analyses, expériences, travaux de recherche…
Sur l’image ci-dessus, de gauche à droite : le modérateur, Sélim Ennjimi, co-fondateur et dirigeant de l’agence Tata Germaine, et les intervenant·e·s :
- Charles-Alexandre Delestage, docteur en sciences de l’information et de la communication, responsable du Lab FAB®ICC, Université de Poitiers ;
- Hélène Marie-Montagnac, maîtresse de conférences en sciences de l’information et de la communication, Université Bordeaux-Montaigne ;
- Monica Paredes, doctorante à l’Université Rennes 2.
Le numérique c’est avant tout…
Monica Paredes
Quand on parle de numérique, le premier réflexe est de penser « informatique », mais son périmètre est bien plus large ; on est effectivement à la fois à la croisée des infrastructures, des outils et des usages. Quand on parle de numérique, on ne se réfère pas en effet seulement à l’aspect technique mais aussi aux usages qui impactent notre environnement et notre rapport à l’espace et au temps. Plus globalement, l’utilisation du numérique change nos rapports et nos manières de penser et de comprendre le monde, et d’y être présent ici et maintenant.
Le numérique est beaucoup assimilé à la dématérialisation d’œuvres, de contenus mais également de pratiques. Une multitude de sites, de réseaux sociaux ou de plateformes invitent les usagers à être plus participatifs, à être dans un rapport où on va être contributeurs et actifs de la société et à créer de nouveaux liens. Cela dépasse de fait le côté virtuel et passif de l’usage du numérique.
Petite parenthèse : d’un point de vue étymologique, il y a une vraie particularité française quand on parle de numérique ; on se réfère au nombre (le numérique 0 – 1) alors que, dans les autres langues européennes, on parle plutôt du mot digital, qui privilégie le sens du toucher, donc de la dextérité digitale.
Le numérique est-il forcément innovant ?
Hélène Marie-Montagnac
L’innovation n’est pas l’invention. On retrouve effectivement dans l’étymologie le terme de nouveau mais toutes les inventions ne deviennent pas nécessairement des innovations. Ce ne sont que les inventions qui vont trouver leur public qui vont pouvoir devenir innovations.
Certaines inventions tombent parfois dans les oubliettes, par exemple l’imprimerie qui, contrairement à ce que l’on pense, n’est pas une invention mais une innovation datant de la fin du XVe siècle. C’est en effet « seulement » une invention des Chinois mais qui n’avait pas alors trouvé son public. Cette invention ne s’était pas intégrée dans les pratiques sociales de cette époque-là et de ce fait, n’avait pas été intégrée en tant qu’innovation.
Pour aller plus loin, une innovation, si l’on reprend la définition qu’en propose Norbert Alter dans L’Innovation ordinaire, diffère de l’invention dans le sens où elle représente la mise en œuvre de cette invention et de son intégration dans un milieu social. C’est ici le processus selon lequel un corps social confronte les qualités théoriques de l’invention qui lui est proposé à la réalité et aux contingences du milieu d’où il agit. S’il se l’approprie, alors l’invention devient une innovation.
Le numérique peut permettre une innovation car il peut permettre de nouveaux processus au sein du corps social, mais pas nécessairement automatiquement.
Charles-Alexandre Delestage
Très souvent, les outils numériques peuvent transposer des outils existants dans le mode physique (par exemple, des jeux de plateau en version virtuelle) mais n’auront rien d’innovants. Des applications vendues comme innovantes sont en fait des procédés déjà utilisés en crayon papier depuis très longtemps. Il peut y avoir d’autres avancées, notamment pour le cas de la musique. Le cas du synthétiseur est assez particulier car il va changer énormément les usages. Quand on utilise un piano, on va avoir toute une architecture basée sur une table qui va faire vibrer des cordes et qui va créer un son, tandis qu’un synthétiseur va créer une fréquence ou un signal numérique qui va décrire un son qu’on va devoir traiter. Au lieu de travailler en musique acoustique sur le positionnement d’instruments ou insister sur son attaque pour avoir une plus forte vibration, on va être sur d’autres usages, d’autres modalités, d’autres possibilités.
Le numérique n’est pas de fait une innovation, mais est-il une extension d’un concept déjà utilisé par le passé ?
Hélène Marie-Montagnac
Bien souvent, ce qui est innovant ce sont le processus, les usages que l’on va développer, et non pas l’outil. Le numérique n’est pas une fin en soi, le numérique est là pour servir un projet, pour poursuivre un objectif mais ne constitue pas cet objectif lui-même. On va retrouver l’innovation dans tous les domaines notamment celui de la pédagogie ; le numérique ne sera alors qu’au service d’une pédagogie et ne peut remplacer la pédagogie elle-même.
Charles-Alexandre Delestage
Pour tout projet et de manière générale et systématique, vouloir imposer un choix technologique, avant même de penser à la finalité d’un projet, c’est un peu se tirer une balle dans le pied. L’outil ne fait pas tout : ce n’est pas parce qu’on veut utiliser du numérique pour une exposition de musée, pour un spectacle, pour de la création, que ce sera forcément mieux. Peu importe le projet, il faut vraiment se poser la question de sa finalité, du public, mais ça, quand on fait de la gestion de projet en général, on le sait. Il ne faut surtout pas chercher à imposer spécifiquement un outil ou une technologie : ce n’est pas ce qui va garantir un succès quelconque.
Le numérique dans la création renouvelle les esthétiques artistiques
L’apport du numérique dans la création, l’exemple de l’intelligence artificielle
Charles-Alexandre Delestage
On peut parler, pour cette question, de l’intelligence artificielle (IA) car il y a aujourd’hui énormément de fantasmes sur cette question. Il faut d’abord démystifier ce concept : une intelligence artificielle n’a rien d’intelligent, c’est extrêmement stupide.
Pour expliquer très simplement comment ça marche : une IA se base sur des perceptrons ; un perceptron c’est une petite boîte (un algorithme) dans lequel on met de la donnée. Cette petite boîte calcule une fonction très simple qui génère, à partir de que l’on y a mis, autre chose selon la façon dont la boîte travaille.
Toutes ces petites boîtes sont mises dans un grand réseau, et la fonction qui va organiser entre elles les boîtes va produire une structure particulière. C’est globalement le processus de deep learning. Pour que les petites boîtes fassent bien ce qu’on leur demande, on va mettre une quantité de données massive, mais des données qui sont connues. Par exemple, on va donner à notre IA des photos en lui disant que telle ou telle photo représente soit un chien soit un chat. On va mettre ces données dans une petite boîte ; le réseau va se reconfigurer de façon à pouvoir prédire que c’est bien un chien ou un chat.
Si on veut faire un parallèle avec l’être humain, il y a tout un pan de la recherche sur la construction de sens, notamment Francisco Varella avec l’énaction. Toute cette construction de sens va faire intervenir l’ensemble de nos sens et l’environnement dans lequel on vit. C’est-à-dire qu’en fonction de cet environnement, on va avoir des points de repère, des façons de qualifier l’environnement qui vont être différentes d’un environnement à l’autre. Cette construction de sens est pleinement subjective. Même si le langage nous sert de convention, quand je vous dis un chat, vous voyez ce que c’est. Pour autant quand je dis le mot chat, vous n’avez pas forcément la même représentation du chat d’un point subjectif que la mienne, mais pour autant on arrive à se comprendre. C’est une subtilité que la machine, en tout cas pour le moment avec les niveaux d’IA qu’on est capable de produire, n’est pas spécialement capable de distinguer. Même si une IA très entraînée arrive à faire la distinction entre un chat et un chien, elle ne vous expliquera jamais ce qui distingue l’un ou l’autre, parce que ce ne sont que des poids statistiques.
L’IA ne fonctionne pas autrement, c’est juste de la force brute, cela n’a rien d’intelligent. Cela dit, ce n’est pas parce que ce n’est pas intelligent qu’on ne peut pas faire des choses intéressantes avec. L’IA est un outil, la question c’est qui tient l’outil, ce que l’homme va faire avec.
Et c’est là que, dans la culture, on pourrait se saisir de l’IA.
On peut ainsi voir les applications de l’IA dans la conception de décors numériques par la société Nvidia par exemple.
Le numérique va-t-il remplacer la médiation humaine ?
Monica Paredes
Le numérique est aujourd’hui un outil qui vient en complément de la médiation traditionnelle. Il faut se poser la question du pourquoi on va utiliser cet outil. On pense parfois que les digital natives sont les personnes qui s’approprient le plus facilement les outils numériques et donc qu’on remplacera naturellement la médiation humaine. Mais c’est une contre-vérité, un mythe urbain. Cela dépend surtout de comment l’outil est fait : quelle est sa valeur ajoutée ? qu’est-ce qu’il va apporter au niveau du rapport à l’œuvre et à son appropriation ?
Je me rends compte, avec les projets que j’ai suivis et les observations que j’ai faites, qu’un médiateur doit nécessairement être présent pour faire la relation avec l’outil numérique. Le médiateur aura d’autres compétences mais je ne vois pas de réels changements dans ses principales missions. Il y a par contre aujourd’hui le souci de s’interroger sur comment le médiateur s’approprie les outils. Par exemple, il y a une formation Médiation et numérique au sein de l’Université de Rennes qui s’emploie à transmettre de quelle manière on peut se saisir des usages de ces nouveaux outils mais surtout de quelle manière on peut créer un autre lien.
Le numérique permet-il d’élargir les publics ?
Hélène Marie-Montagnac
La question des publics dépasse largement la question du numérique : là encore le numérique ne reste qu’un outil. S’il n’est pas au service d’un vrai projet, en tant que tel, il ne peut rien élargir du tout. Ce n’est pas parce qu’on va poser des tablettes ou mettre à disposition des outils numériques qu’un nouveau public va se ruer dans les musées ou autres structures culturelles. En revanche, il est vrai que le numérique peut être un support pertinent de médiation pour peu qu’il soit pensé pour avoir une certaine forme d’attractivité à destination de certains publics et permettre effectivement de proposer d’autres offres de médiation, d’accès aux œuvres, notamment à destination d’un public plus jeune.
Le numérique permet-il un rapport à l’œuvre plus individuel ou plus partagé ?
Monica Paredes
Tout dépend du projet : si c’est un projet pensé autour de la participation du public, forcément il permettra un rapport plus partagé.
Charles-Alexandre Delestage
C’est en fait une question de design d’expériences. Le numérique peut entraîner une expérience à distance avec une corporalité virtuelle et avec une possibilité de partage, ou, à l’opposé, une expérience personnalisée et individualisée, mais là, on va tomber sur la question des droits d’utilisation des données personnelles.
Hélène Marie-Montagnac
Le rapport à l’œuvre est déjà différent selon la personne. Certains d’entre nous préféreront la contemplation individuelle de l’œuvre, d’autres auront besoin d’être accompagnés par une personne avec qui discuter, exposer, commenter, etc. Donc le numérique ne change rien à cela. En réalité, le numérique peut être un outil qui effectivement permet de s’isoler et de se maintenir à distance, ou, au contraire, va permettre d’avoir un rapport pléthorique avec tout un tas de gens.
Sur le plan de la recherche, on a différents chercheurs dans les sciences de l’information et de la communication qui se sont penchés sur le sujet, et c’est vrai que les points de vue, là aussi, peuvent diverger. On va avoir un Dominique Wolton qui va parler de solitude interactive – on voit déjà l’oxymoron dans cette énonciation. On va retrouver ce postulat avec l’américaine Sherry Turkle dans son ouvrage Seuls, ensemble, qui dénonce aussi ce paradoxe mais qui n’est pas inhérent au numérique mais plutôt aux individus qui ont, à la fois besoin de rester tranquilles dans leur quant-à-soi, et besoin de communication. Donc, somme toute, le numérique ne change strictement rien à ça. Et puis, on va avoir un Antonio Casilli qui, avec Les Liaisons numériques : vers une nouvelle sociabilité ?, va mettre en avant que le numérique n’est là que pour prolonger les relations existantes, les renforcer ou au contraire les affaiblir. Finalement, une fois de plus, le numérique n’est qu’un outil et ne peut être pointé comme responsable de telle situation ou telle autre. Il ne fait qu’offrir de nouvelles possibilités ; on peut le considérer comme un amplificateur mais pas comme une révolution.
Le numérique dans ma structure c’est…
Quelques exemples d’appropriation du numérique au sein de projets culturels
MUSÉE DU PAPIER D’ANGOULÊME
Charles-Alexandre Delestage
J’ai travaillé sur un projet de recherche avec le Musée du Papier d’Angoulême, musée assez particulier qui se trouve dans une ancienne usine de fabrication de papier datant du XIXe siècle et qui a fermé dans les années 70. Elle est située sur le fleuve Charente, avec le parcours d’exposition principal à l’emplacement des roues à aube. Donc je vous laisse imaginer, en hiver, les conditions de visite, pas très semblables à celles d’un musée classique, mais plutôt compliquées : le bruit de l’eau, une certaine humidité, etc.
Plus d’infos sur le site du Musée du Papier d’Angoulême : https://maam.angouleme.fr.
Le public familial est un public qui intéresse énormément les musées, et notamment le Musée du Papier. Le laboratoire de recherche FAB®ICC a donc monté un partenariat et travaillé sur un cadre conceptuel sur le suivi des visites familiales interactives.
Dans l’idée, il y a deux tablettes, une pour le parent, une pour l’enfant, et chacun a son rôle. Le parent « prend la place » du médiateur culturel, il va avoir accès à toute une série d’informations – notamment des images d’archives –, et l’enfant va avoir des contenus beaucoup plus ludiques – des petits jeux, des scènes animées avec des marionnettes de papier pour avoir un effet visuel très attractif. Sur certaines parties du musée, on a apporté de la vie à des éléments d’exposition, par exemple une maquette d’un moulin à papier du XVIIe siècle. On a fait réaliser des animations en stop motion qui décrivent les différentes étapes de fabrication du papier de l’époque et qui sont intégrées dans l’application de façon très didactique pour faire comprendre, à l’enfant et aux parents qui disposent des mêmes animations, comment fonctionnait le principe du papier à l’époque. Et vu qu’ils ont à la fois la maquette devant eux, les animations et qu’ils sont amenés à partager, à échanger, à interagir ensemble autour de ce dispositif – par nature transmédia –, on a eu d’excellents retours lors de la période d’évaluation avec une quarantaine de familles vis-à-vis de ce type de médiation. Parce que le numérique n’était pas juste une extension de cartels juxtaposés l’un à côté de l’autre avec 2-3 images d’archives en plus.
Quand je vous disais que le numérique n’était pas par nature innovant : simplement, faire une application pour mettre une juxtaposition de cartels pour une visite de musée, ça n’a rien d’innovant ; tandis que proposer des contenus qui sont adaptés sur-mesure au parcours du musée, là il y a nécessairement une valeur ajoutée. D’autant plus si ces contenus sont interactifs d’un point de vue individuel mais aussi du point de vue de la famille et qu’ils permettent le « faire-famille » : en cela, le numérique, vu qu’il coordonne tous ces espaces-là, donne une réelle plus-value.
QUEL EST L’IMPACT GENERE PAR CET OUTIL DANS LE RAPPORT A L’OBJET OBSERVE ?
Charles-Alexandre Delestage
Par rapport au Musée du Papier d’Angoulême, dans le cadre de l’étude, on suivait les personnes qui visitaient le musée avec la tablette. Il y a une grille d’évaluation pour voir s’il y a de la communication verbale / non-verbale, regarder les comportements pour savoir si l’enfant n’avait pas les yeux rivés sur la tablette sans regarder autour de lui – ça n’a globalement pas été le cas. Après, cette étude ne reste qu’un exemple. Les exemples ne sont jamais bons à généraliser.
Donc, je ne vais pas garantir que le numérique permet de mieux regarder le musée. Il y a toujours le risque de voir l’attention complète d’un spectateur portée plus sur l’objet numérique que sur l’objet à observer. Tout dépend de la façon dont le dispositif numérique s’intègre dans la visite du musée. Cet exemple de type de médiation a été transposé en cadre conceptuel mais ça ne garantit évidemment pas les mêmes résultats, tout dépend de la mise en projet.
Hélène Marie-Montagnac
Pour répondre à la question de l’attention, il semble qu’en réalité cela ait peu à voir avec les musées ou autres structures culturelles, mais que nous sommes tous dotés de smartphones : ce que nous constatons, par exemple dans des concerts, c’est que certains publics peuvent d’abord se préoccuper de filmer ou de photographier, et d’être du coup bien davantage en interaction au travers de cet outil – un outil qui constitue sans doute un obstacle à une relation émotionnelle directe à l’objet pour lequel ils sont venus, que ce soit dans un musée, dans un concert ou autre.
Cette question de la médiation se pose pour les outils qui sont mis à disposition, mais en dehors même de ces outils, nous avons tout un chacun instauré notre propre écran et là, le terme prend tout son sens par rapport à ce que nous vivons autour de nous.
Charles-Alexandre Delestage
C’est vraiment une question d’usages, et il y a tout un pan de la recherche qui se développe en ce moment autour du design d’expérience. Même si on prévoit que la personne passe à tel endroit du musée avec telle interaction avec un outil numérique, une installation lumineuse… la personne fera de toute façon ce qu’elle veut.
On ne peut pas la diriger et c’est peut-être pas plus mal non plus. Si cette personne considère que passer un moment dans le musée rivée sur une tablette lui donne plus de plaisir que de prendre du temps à regarder les œuvres, c’est son choix. Et ça ne présuppose pas forcément que passer trop de temps sur son téléphone implique une mauvaise expérience.
Monica Paredes
Le rapport est différent quand on utilise un outil numérique car on crée un autre lien que celui que le médiateur a l’habitude de créer, parce qu’il y a une appropriation de l’œuvre différente de celle qu’on a l’habitude de voir. Il faut changer la manière de penser la création de la relation pour apprécier différemment l’œuvre.
L’ODYSSEE DE PENELOPE
Monica Paredes
J’ai pu travailler sur l’étude du dispositif transmédia sur l’Odyssée de Pénélope, un dispositif inventif et précurseur qui accompagne Le Retour d’Ulysse dans sa patrie de Monteverdi. Ce projet a utilisé une nouvelle forme de narration qui a utilisé différents médias pour développer un univers ou raconter une histoire. De par leur spécificité d’usage et leur technologie, chaque support employé (site web, mobile, tablette, jeu vidéo, etc.) a développé un contenu narratif différent, offrant au public un regard nouveau et complémentaire sur l’histoire.
Plus d’infos ici :
- https://fr.calameo.com/read/003045515b88f623c09c1
- http://www.tmnlab.com/2017/03/21/odyssee-de-penelope-o2p-dispositif-transmedia-inventif-precurseur-accompagne-retour-dulysse-patrie-de-monteverdi-theatre-champs-elysees
Ce projet a été perçu comme très intéressant par les étudiants qui ont porté le dispositif, parce qu’ils se sont approprié l’œuvre avec une interprétation très différente du champ classique. Ils se sont rendus compte que cet opéra, qui est une pièce contemporaine, n’avait pas le côté suranné de l’opéra. Ils ont eu ensuite la sensation de ne pas avoir eu assez d’interactions avec les publics et se sentaient assez isolés dans le portage de la médiation, leur travail étant plus lié pour eux à de la communication qu’à de la médiation. Par ailleurs, il n’y a pas eu de différenciation entre ces deux axes sur ce projet parce qu’ils souhaitaient une interaction au-delà des groupes qui y participaient – 120 étudiants –, mais cette interaction n’a pas émergé avec d’autres groupes de publics.
Un problème a été également soulevé sur le manque d’interaction sur ce projet entre les équipes de la structure culturelle, sur l’absence de partage de compétences entre médiateurs et chargés de communication autour de l’aspect novateur de ce projet. Il est important de se fixer des objectifs et de prévoir quel type de relation vous voulez créer en interne et avec les publics.
Charles-Alexandre Delestage
Ce qu’il y a de compliqué dans un projet numérique culturel, c’est de faire se parler des domaines qui, par nature, ne se parlent pas beaucoup, par exemple des musées spécialisés en médiation et des studios de création de contenus créatifs et de communication graphique. Tout l’enjeu est de partir de sémantiques différentes pour faire un langage commun.
Autre élément, avec le numérique, il ne faut pas se poser de barrières ni se poser la question si ça existe ou pas. Quand on passe à la conception du projet, on voit s’il y a des verrous technologiques ou pas, et s’il y en a, on attend deux ans et il n’y en a plus.