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Vicious Circle | le label qui croit au vinyle

© Vicious Circle
Mis à jour le 04 décembre 2025

Depuis plus de trente ans, le label bordelais Vicious Circle trace son chemin dans le paysage musical indépendant français. Dans un marché où le streaming domine et où les coûts de production ne cessent d’augmenter, le label continue d’accorder une place centrale au vinyle. Un choix assumé, réfléchi, et profondément ancré dans son identité.

Le vinyle comme marque de fabrique

Le vinyle comme marque de fabrique

Fabriquer un vinyle coûte en moyenne cinq euros pièce pour un tirage standard de 500 exemplaires. Pour réduire ces coûts, Vicious Circle mise régulièrement sur des pressages plus importants, entre 1500 et 2000 unités. Chaque quantité est pensée en amont, projet par projet, afin de limiter les invendus.
Même si les années 2000 et 2010 ont marqué une période de recul — tous les groupes ne bénéficiaient plus systématiquement d’un pressage — le vinyle n’a jamais disparu du catalogue. Au contraire, il a retrouvé depuis 2015 une croissance continue, alors que les ventes de CD n’ont eu de cesse de diminuer.

Un objet qui dépasse la musique

Un objet qui dépasse la musique

Pourquoi maintenir le vinyle malgré les coûts ? Pour Vicious Circle, la réponse tient à plusieurs niveaux.
D’abord, il s’agit de proposer plusieurs formats à prix accessibles, autour de 17 euros. Ensuite, c’est l’attachement à l’objet qui guide le label : travail sur les couleurs, éditions limitées, distinction entre vinyles noirs (destinés aux grandes chaînes) et vinyles couleurs (réservés aux disquaires indépendants et à la vente directe). Les éditions limitées à 100 exemplaires ne sont pas repressées, renforçant leur caractère précieux.

Aussi, les esthétiques défendues par le label — rock indépendant et ses nombreuses déclinaisons — se prêtent parfaitement au son vinyle. Et même si certains n’écoutent le disque qu’une fois avant de retourner au streaming, le physique reste une source majeure des revenus du label.

« Le rock indé ne se stream pas beaucoup. »

Guillaume Le Collen, responsable promotion et production chez Vicious Circle –

Vicious Circle est également présent dans le paysage culturel toulousain à travers son propre disquaire, offrant un lien privilégié avec un réseau de distribution indé, loin des grandes chaînes.

À cela s’ajoute le rôle essentiel de l’image : devenu objet de collection, le vinyle est aujourd’hui un support de visibilité important. L’image a de l’importance : une belle pochette circule mieux, attire, existe sur les réseaux sociaux et chez les disquaires. Dans un secteur où la visibilité est devenue une forme de monnaie, le visuel compte presque autant que le son.

Le vinyle oui, mais pas au détriment de l’environnement

Le vinyle oui, mais pas au détriment de l’environnement

Dans leurs tous nouveaux locaux dans le quartier Saint-Seurin à Bordeaux — qu’ils partagent avec deux autres labels — nous sommes loin des entrepôts géants où les palettes s’empilent. Ici, les vinyles ne restent jamais longtemps. La plupart partent directement chez les distributeurs, en France et en Europe, dès la sortie du pressage ; d’autres sont envoyés aux groupes qui partent en tournée et la partie restante se partage entre les rayonnages derrière les bureaux des salariés et un garage qui leur sert de lieu de stockage. Une manière de limiter les transports inutiles et de réduire la taille des stocks.

Le label a également fait le choix stratégique de s’associer avec deux autres structures pour acquérir une presse commune chez Vinyles Record Makers (VRM) à Châtellerault. Cette proximité avec l’usine permet d’affiner les besoins, de fluidifier la communication, et de réduire les coûts de pressage et de transports.

Une production plus vertueuse

La partie la plus polluante actuellement reste la fabrication des matrices, nécessitant l’usage de bains chimiques. Outre le transport et le stockage, la production du vinyle en lui-même a forcément un impact environnemental non négligeable. Vicious Circle y est attentif et travail avec des partenaires qui s’engagent dans une production plus vertueuse. Chez VRM (société de pressage), toute la chaîne de production est européenne, à l’image des impressions qui sont réalisées en Allemagne auprès d’un imprimeur engagé dans une démarche zéro déchet. De plus, le PVC utilisé pour les disques a évolué : les stabilisants au plomb ont été remplacés par des solutions biosourcées.
S’il reste du chemin à parcourir, la filière travaille activement à réduire son empreinte carbone, tout comme pour les CD dont les boîtiers contiennent désormais moins de plastique, voire plus du tout chez Vicious Circle.

ReDISCO : recycler plutôt que stocker

Avec 32 ans d’existence, le label a dû apprendre à gérer des stocks parfois importants. Pour limiter la perte, les quantités de pressage sont optimisées, et Vicious Circle a participé à plusieurs éditions du projet ReDISCO, porté par La FÉLIN, dédié au recyclage des vinyles.

Les postes d’émissions du secteur des musiques enregistrées

Situons à présent l’impact du vinyle dans les différents postes d’émissions de gaz à effet de serre des musiques enregistrées. Le rapport REC « Réduisons notre empreinte carbone » — porté par le CNM, le SNEP, l’UPFI et le SMA — publié en septembre 2024, stipule que l’ensemble des émissions du secteur s’élevait à 2 780 ktCO₂e en 2022. Si la fabrication du vinyle et sa distribution ont un impact certain, ces deux postes d’émission sont tout à fait marginaux sur la globalité du secteur : moins de 2% seulement.

Visuel qui représente un graphique sous forme de camembert avec les données suivantes : 74% fabrication et consommation d'énergie des terminaux d'écoute ; 22% distribution digitale ; 2% production de musique ; 1% fabrication et fin de vie des supports ; <1% distribution physique.

L’écoute de la musique sur les supports numériques est extrêmement énergivore. L’écoute sur support physique n’est pas sans impact pour autant car elle nécessite l’utilisation de terminaux plus spécifiques (lecteur CD, platine vinyle…). Ses émissions sont moindres car le volume d’écoute est plus faible par rapport au digital.
Toutefois, si l’on regarde les émissions liées aux supports d’écoute, on constate que pour une heure d’écoute le vinyle est le plus émetteur de tous (en comparaison au téléchargement, à l’audio, la vidéo, la radio, la télévision et au CD). La fabrication et la fin de vie des platines est la partie la plus émettrice, suivie de la fabrication et fin de vie du vinyle en lui-même et enfin de sa distribution.


Le saviez-vous ?

Un acteur fédérateur du secteur indépendant

Philippe Couderc, fondateur de Vicious Circle en 1993, a toujours défendu une vision collective du métier. Il a contribué à impulser des structures majeures telles que Le RIM (Réseau des indépendants de la musique) et La FÉLIN (Fédération Nationale des Labels et Distributeurs Indépendants). C’est donc tout naturellement que l’équipe actuelle de Vicious circle continue de participer à ces dynamiques fédératrices. La volonté de mutualiser les forces et de défendre les valeurs du secteur indépendant fait partie de l’ADN du label.

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